Kamel Daoud accusé d'avoir volé l’histoire qui lui a valu le "Goncourt"

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L’écrivain franco-algérien Kamel Daoud, a à peine eu le temps de savourer son "Goncourt", pour le roman « Houris », qu’une certaine Saâda Arbane, une femme vivant à Oran, le menace de poursuites et affirme que ce prix a été fondé sur l’histoire vraie de sa propre vie.

Dans un français à peine audible, empreint de colère et de tristesse, les yeux pleins de larmes, Saâda Arbane a raconté son histoire, hier vendredi, à la chaîne « One TV ». Elle a découvert que le succès éclatant de Kamel Daoud avec « Houris » était en réalité basé sur les événements de sa propre vie, qu’elle avait partagés avec l’épouse de l’écrivain, psychologue, pendant des séances thérapeutiques visant à la soigner des traumatismes d’un crime atroce qu’elle avait subi il y a 25 ans, lorsque sa famille a été massacrée par un groupe armé dans un village près de Tiaret, alors qu’elle n’avait que six ans.

Dans l’interview donnée à la chaîne, Saâda Arbane, qui a miraculeusement survécu au massacre, a expliqué qu’elle souffre d’une blessure au niveau du cou, qui a sérieusement affecté ses cordes vocales. Son mari la soutenait activement, manifestant un grand engagement pour sa cause.

Arbane a déclaré que le roman n'était pas une œuvre de fiction, comme Kamel Daoud l’a affirmé dans les médias français, mais qu’il s’agissait de l'exploitation de son histoire personnelle sans son consentement. Pire encore, elle accuse le livre d’être une "violation du secret professionnel" de la part de l’épouse de l’écrivain, en exposant des conversations, des documents et des rapports médicaux qui confirment ses allégations.

Née en 1993 à Djelfa, Saâda a raconté avec difficulté les détails de sa tragédie, qu’elle qualifie de presque insurmontable. Toutefois, elle a réussi à poursuivre sa vie et a accompli de grandes choses, comme devenir championne d’équitation.

Concernant la manière dont son histoire est parvenue à Kamel Daoud, Saâda a expliqué qu’elle ne connaissait pas l’écrivain, mais qu’elle avait commencé à consulter son épouse, psychologue, depuis 2015 dans le cadre de ses séances de thérapie.

Elle a ajouté que les événements relatés dans « Houris » correspondent parfaitement à sa propre histoire, notamment les cicatrices sur son visage, le tube respiratoire fixé à son cou, les tatouages sur son corps, la tentative d’avortement, le salon de beauté, le lycée Lotfi, la nature de sa relation avec sa mère, l’opération qu’elle devait subir en France et la pension qu’elle reçoit. Tous ces éléments sont présents dans le roman de Daoud, selon elle.

Saâda a aussi révélé que Kamel Daoud lui avait proposé à plusieurs reprises de transformer son histoire en livre, lors de rencontres familiales chez lui, mais elle avait fermement refusé. Elle a été choquée de découvrir récemment, par une amie en France, que des gens parlaient d’un livre qui racontait son histoire de façon étonnamment fidèle.

Elle a alors contacté l’épouse de Kamel Daoud pour clarifier la situation, mais cette dernière a nié en affirmant que le roman "ne parlait pas d’elle" et lui a présenté une copie du livre, signée par l’écrivain, avec un message d’admiration : "Notre pays a souvent été sauvé par des femmes courageuses, et tu es l’une d’entre elles, avec mon admiration ".

Saâda a réagi avec calme à la réponse de l’épouse de Kamel Daoud, mais cette dernière lui aurait annoncé des projets futurs pour le roman, comme en faire un scénario de film, dans l’espoir de réaliser des bénéfices financiers pour tout le monde, ce que Saâda perçoit comme une tentative de l'acheter et de l'amener à se taire.

Après la publication du roman, Saâda a reçu de nombreux appels de personnes se demandant combien elle avait été payée pour partager son histoire, car elles savaient qu’elle avait toujours refusé de la rendre publique.

Cette révélation a bouleversé Saâda, la privant de sommeil pendant trois jours, car elle lui rappelle une tragédie qui lui a coûté 25 ans de soins psychologiques.

Lors de l'interview, elle a évoqué les horreurs de son histoire, expliquant comment elle avait retrouvé des photos d’elle-même marquée par la violence du massacre, ainsi que des rapports médicaux attestant de son état. En larmes, elle a souligné qu'aucune personne ne devrait avoir le droit de décider comment et quand son histoire doit être publiée.

Quant à ce qu’elle compte faire à propos de cette affaire, Saâda a indiqué qu’elle irait jusqu’au bout de la démarche, car elle considère que c’est "une violation flagrante de sa vie privée" et une "révélation de secrets professionnels".

Les déclarations de Saâda montrent que son accusation contre Kamel Daoud et son épouse repose sur une relation entre les deux familles, avec des preuves solides sous forme de photos, de messages et d'autres éléments. Il appartiendra aux autorités judiciaires de décider si cette affaire donnera lieu à des poursuites pénales, en se basant sur la législation algérienne.

D’un point de vue juridique, certains experts estiment que les faits pourraient entraîner des poursuites contre l’épouse de Kamel Daoud, pour violation du secret professionnel. En revanche, ils écartent la possibilité de poursuivre l’écrivain lui-même, puisqu’il ne l’a pas nommée explicitement dans son roman.